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Géorgie et France : Vladimer Gogouadzé (1880-1954), commandant de trains blindés


GOGOUADZÉ VOLODIA, VALODIA DIT LADO
mardi 18 janvier 2011, par Mirian Méloua

 

L'enfance et le service militaire


Volodia Gogouadzé naît en 1880 (1) en Gourie, province occidentale de La Géorgie, dans le village de Tchantchati. Ses parents, Elizabedi et Saba, sont des petits cultivateurs et il doit quitter l'école à l'âge de 10 ans. De 11 à 20 ans, il s'emploie tour à tour dans le commerce de bois, une usine de pétrole à Batoumi, une scierie et une exploitation forestière, avec des retours à la maison familiale lorsque la malaria le prend.

Il est appelé au service militaire dans les armées du tsar, à Odessa en 1900 : il se distingue lors des épreuves de tir. Il participe à la campagne victorieuse de Mandchourie, en 1901. Avant d'être libéré fin 1902, il sort diplômé de l'Ecole des sous-officiers.

 

La révolution de 1905


Il suit ensuite l'Ecole des Chemins de fer de Tbilissi et est nommé conducteur de train de marchandises à Bakou. En 1904, il rejoint la section sociale démocrate des chemins de fer de Bakou dans laquelle cohabitent encore bolcheviks et mencheviks.

En février 1905, il participe aux grandes grèves de Transcaucasie et est emprisonné 40 jours à la prison Baïlov. A sa sortie, il se joint au groupe armé de la section sociale démocrate des chemins de fer de Bakou et en prend la responsabilité (2). La révolution est vaincue, mais il continue la fabrication d'engins explosifs et l'entraînement des hommes. Au printemps 1906, il est jugé par contumace par la Cour martiale et sa tête est mise à prix.

 

La clandestinité


Au cours de différentes tentatives d'arrestation, il abat plusieurs membres de la police secrète -l'Okhrana-, de la police et de la gendarmerie. Au cours de missions en service commandé, il élimine un certain nombre d'indicateurs ou de représentants du pouvoir tsariste qui ont contribué à la neutralisation de sociaux démocrates, ainsi que des brigands qui rançonnent petits et grands en toute impunité devant l'incurie des autorités (3).

Il quitte la région de Bakou en 1909 et rejoint la Gourie. Le 11 mai 1916, lors de la protection d'un ingénieur -bâtisseur de pont sur la rivière Gobazoouli et rançonné pour pouvoir poursuivre son travail-, il est grièvement blessé à la rotule. Soigné trop tardivement (les rançonneurs et les gendarmes le pourchassent), il boitera définitivement.

 

La chute de l'Empire russe


En septembre 1917, ä Tbilissi, après de multiples opérations chirurgicales et une courte période de convalescence, il est sollicité par le Soviet d'ouvriers et de paysans afin d'entraîner militairement les premiers éléments de la "Garde rouge". Le 12 décembre, cette "Garde rouge" s'empare de l'Arsenal afin de se procurer des armes et d'équiper un plus grand nombre d'hommes (4).

En janvier 1918, il prend le commandement de son premier train blindé (5). Il intervient contre les soldats russes libérés du front turc par la paix soviético - ottomane de Brest - Litovsk et fauteurs de trouble (Bakou, Koutaïssi, Tbilissi), contre des groupes armés "tatars" (dénomination des Azeris à l'époque) (Gandja et Dzegami) et contre des mutinerie de soldats géorgiens (Telavi).

 

L'indépendance de la Géorgie


En mars 1918, la pression militaire de l'Empire ottoman sur l'Adjarie s'accentue et son train blindé participe aux combats de Kobouléti, Tchakvi et Natanébi : le 8 avril, il l'introduit dans les lignes ennemies par le pont de Tcholoki et surprend l'assaillant avec l'aide des renforts envoyés par le général Mazniachvili (6). Avec trois trains blindés, il attaque l'armée turque près du fleuve Khram, à Achagséra, le 9 juin, à Bortchalo, à Alaverdi et à Sanaïan, le 14 juin (7).

En décembre 1919, les forces arméniennes -appuyées par des éléments de la "Garde blanche" russe- s'emparent de la région de Bortchalo : il rejoint le front le 9 décembre avec deux trains blindés et combat jusqu'au 15 décembrere 1919 : l'arrivée des forces britanniques, envoyées par la Conférence de la Paix de Paris, met fin aux hostilités.

 

L'exil en France


Après l'invasion de la Géorgie par l'armée de la Russie soviétique, en mars 1921, Volodia Gogouadzé et sa femme Namétia, née Berdzénichvili, suivent l'exil de la classe politique en France. Ils s'installent dans la résidence des Géorgiens à Leuville-sur-Orge (Seine et Oise), dans un petit pavillon, à gauche de l'entrée du parc, gardiens de l'histoire des trains blindés et gardiens de l'histoire de l'émigration dans une commune française devenue un peu terre géorgienne.

Volodia Gogouadzé décède en 1954, à l'âge de 73 ans.

Namétia Gogouadzé décède en 1988, à l'àge de 97 ans, après avoir été, durant des décennies, l'animatrice du Foyer qui rassemblait les Géorgiens habitant la résidence et leur lien avec la population et les autorités de Leuville-sur-Orge, sous le nom de Mme Lado (8).

Notes :

(1) La pierre tombale de Volodia Gogouadzé porte 1881 comme année de naissance.

(2) Volodia Gogouadzé cotoie les leaders de la sociale démocratie géorgienne comme Isidore Ramichvili et Vlassa Mguéladzé.

(3) En 1908, à Bakou, le millionnaire "tatar" Moussa Naguïev, enlevé pour rançon par des brigands, est libéré par le groupe armé de Volodia Gogouadzé car l'enlévement est attribué à tort "aux Géorgiens". Pour le remercier, Moussa Naguïev lui enverra plus tard, clandestinement, de l'étranger des armes automatiques dont un fusil "Borkhate" (Petit éclair) qu'il utilisera jusqu'en 1921.

(4) Dans ces mémoires, Volodia Gogouadzé affirme qu'il conduisit l'attaque de l'Arsenal de Tbilissi.

(5) Ce premier train blindé était composé de deux locomitives (dont une Westinghouse) et de deux wagons, transportants 90 personnes dont 70 soldats armés d'une carabine et d'un revolver chacun, disposant de 2 mortiers et de plusieurs mitrailleuses Maxim et Lewis.

(6) Le combat et la victoire sur le pont de Tcholoki, le 8 avril 1918, vaut à Volodia Gogouadzé d'être invité à une séance de l'Assemblée de Transcaucasie, le 12 avril. Conduit par Noé Jordania à la tribune, il entend Irakli Tsérétéli et Evguéni Guéguétchkori louer son action militaire et lui décerner la décoration de "Premier héros de la Révolution".

(7) C'est au cours de cette campagne contre l'armée turque, en juin 1918, que Volodia Gogouadzé conduisit un nouveau combattant au front, sa femme Namétia alors âgée de 27 ans.

(8) Souvenirs : "Pour les enfants issus de l'émigration géorgienne en France, Valodia, avec sa démarche chancelante et sa canne, était un héros sorti d'un livre d'histoire que l'on imaginait perché sur son "rkinis ouremi", (littéralement chariot de fer), attaquant et vainquant les bandits et les ennemis. Nametia était la dame, un peu autoritaire, chez qui l'on allait acheter les fameux "fromages géorgiens" -introuvables ailleurs- : elle reprenait les enfants s'ils ne s'exprimaient pas en langue géorgienne et apostrophait le vacher "Sebasti" lorsqu'il ne vaquait pas assez vite à ses occupations.

Source : feuilles manuscrites de souvenirs écrits en langue géorgienne par Volodia Gogouadzé, rassemblées et classées par Namétia Gogouadzé et traduites en langue française par Jacqueline Khabouliany.



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